Toutes les critiques de Mensonges d'Etat

Les critiques de Première

  1. Première
    par Christophe Narbonne

    Six ans après La Chute du Faucon Noir, Ridley Scott se penche à nouveau sur la façon dont l’Amérique gère, sur le terrain et en dehors, les conflits internationaux auxquels elle est confrontée. Le constat qu’il en tire n’a pas énormément varié. Somalie hier, Irak aujourd’hui : la puissance américaine s’exerce avant tout par la force. Le film démontre en effet, à travers le double portrait d’un agent de terrain et de son supérieur, rivé devant des images satellites, que la méconnaissance de l’autre (sa culture, son mode de vie et de pensée) conduit à d’imprudentes et fatales décisions. Vétéran de la CIA pour qui la valeur d’un homme, fût-il des siens, passe après la raison d’État, Ed Hoffman (incroyable Russell Crowe, grossi de trente kilos) ordonne des exécutions par téléphone ou assigne des missions périlleuses tout en bordant sa fille. À des milliers de kilomètres de là, en Jordanie, Roger Ferris (Leonardo, au top de sa forme et de son jeu) met sa peau en danger en tentant d’infiltrer les réseaux terroristes afin de recueillir des informations plus ou moins vitales, tout en conservant une part d’humanité et une conscience intacte. Un troisième personnage, l’énigmatique chef des services secrets jordaniens, introduit une autre dimension : celle du pragmatisme des petites nations qui rivalisent avec les grandes puissances en privilégiant le facteur humain et l’intuition. Avec l’art consommé de la mise en scène qu’on lui connaît, Scott réussit non seulement un formidable film d’action bourré de temps forts mais propose également une lecture passionnante et synthétique des conflits modernes. Passons sur les quelques facilités narratives (comme la romance artificielle entre Ferris et une jolie autochtone) pour saluer la performance.

Les critiques de la Presse

  1. Fluctuat

    Après American Gangster, Ridley Scott poursuit son hagiographie américaine dans Mensonges d'état. Un thriller géopolitique sur fond de guerre contre le terrorisme par ceux qui la font. Plus faible mais pas moins inintéressant, un bel objet théorique.Roger Ferris (Leonardo DiCaprio), agent de terrain américain rompu à la réalité du monde arabe est en Irak, il doit rencontrer un informateur. Celui-ci le met sur la piste d'un réseau terroriste bientôt responsable d'un attentat meurtrier à Sheffield qui l'obligera à parcourir le Moyen-Orient. Ferris, en liaison constante avec Ed Hoffman (Russell Crowe), son supérieur hiérarchique, veut sauver la vie de son informateur, lui donner son ticket pour les Etats-Unis car sa tête est mise à prix. Hoffman refuse, l'informateur meurt, Harris accompagné d'un complice irakien tombent dans une fusillade. Pendant l'attaque, une roquette percute leur véhicule, le corps du complice vole en morceaux, des fragments d'os iront se loger sous la peau de Ferris. Ainsi débute Mensonges d'état, ou plus justement titré en version originale, Body of Lies. Durant cette première partie du nouveau Ridley Scott, un détail, apparemment anodin, résume pourtant le film en reprenant un motif esthétique récurrent du cinéaste. Ce détail, c'est ce bout d'os que DiCaprio prend soin de ranger dans une boîte d'allumettes. On ne le reverra plus durant la suite du film, le scénario ne prendra jamais la peine de nous rappeler son existence, ni l'image d'appuyer sur sa signification. Pourtant impossible de l'oublier lorsqu'on sait combien le cinéma de Scott a fondé son esthétique sur ces lumières vaporeuses où volent dans l'air des flots de particules : sable, eau, poussière, et désormais les corps.. Mensonges d'état décevra ceux qui furent emporté par le souffle et l'ambition d'American Gangster. Construit en trois parties gigognes, ce thriller géopolitique sur fond de terrorisme, de guerre du renseignement, d'Amérique post 11-Septembre et de technologie n'a pas l'ampleur et la densité du précédent film de Ridley Scott. Il n'en demeure pourtant pas négligeable et fidèle aux obsessions d'un auteur qui tente obstinément de remettre l'occident au centre de l'Histoire. Son intérêt repose moins sur les ressorts de l'intrigue entre les personnages ou ce qu'ils disent du sujet, qu'à leur fonction ici et dans l'oeuvre de Scott. Car Mensonges d'état se veut une affaire de pouvoir et de point de vue, celle sur la réalité depuis ceux qui la vivent sur le terrain (Ferris), et ceux qui la perçoivent, l'analysent, la dissèquent depuis leur puissant système de surveillance (Hoffman). Un film binaire donc, selon deux pôles supposés s'entrecroiser et révéler leur complexité dans la guerre contre le terrorisme. Soit un jeu de regards où chacun symbolise une idée de l'Amérique : d'un côté l'homme ouvert à l'étranger, au monde arabe, de l'autre l'analyste arrogant et cynique qui sauve notre civilisation en pantoufle, dans son jardin en dévorant ses corn-flakes. Scott soulignant ainsi explicitement l'aveuglement et la distance de l'un, cantonné à sa politique de résultat froide, idéologique, militaire, quand le second oeuvre avec respect, lucidité, dans le feu de l'action, mais constamment soumis aux manipulations du premier.Parce qu'il réitère l'idée d'une guerre de l'information partagée entre adeptes de la technologie (l'Amérique) et les autres (terroristes et services secret jordaniens), Mensonges d'états peine parfois à donner de l'épaisseur à ses enjeux critiques et politiques - ou simplement à donner du carburant au scénario. Mais peut-être que l'intérêt du film est ailleurs. Moins dans le rythme tortueux du thriller moderne - au contraire, priment ici la transparence des idées et la limpidité de l'action ; ni dans la vision d'une Amérique en quête de vérité et de rédemption - DiCaprio est notre bonne conscience, Crowe la mauvaise ; que dans cette idée du motif, ce fameux fragment d'os, véritable résumé du personnage éclairant la théorie des particules chez Ridley Scott. Et qu'est-ce que ces particules signifient sinon ces molécules dont le monde est fabriqué ? Autrement dit, Ferris possède sur lui la preuve que la réalité ne se résume pas, dans ses moments de crise ou non, aux procédures déshumanisées et synthétiques d'Hoffman qui vit cette guerre par téléphone ou écran interposé ; il sait que le réel est composé d'une multitude d'éléments et de corps soumis à l'hétérogénéité du vivant. Ainsi Ferris, après avoir combattu pour une machine et des hommes incapables de regarder ce monde, peut rendre les armes. Telle est la conclusion, celle d'un homme recouvrant sa liberté pour rompre avec cette guerre et ceux qui la font. Car il a mieux à faire, comme l'amour à cette belle Jordanienne pour qui il donnerait sa vie.Mensonges d'étatDe Ridley ScottAvec Leonardo DiCaprio, Russell Crowe, Mark StrongSortie en salles le 5 novembre 2008Illus. © Warner Bros. France - Exprimez-vous sur le forum cinéma- Lire les fils film policier, réalisateur sur le blog cinéma- Ridley Scott sur Flu : lire les critiques de Une Grande Année (2007), American Gangster (2007), Kingdom of Heaven (2005), La Chute du Faucon Noir (2002), Hannibal (2001), Gladiator (2000)- Notre dossier Le 11 septembre au cinéma

  2. Le JDD
    par Stéphanie Belpêche

    Mensonges d'état marque le retour en bonne forme de Ridley Scott, visiblement à l'aise dans le registre du thriller politique qui démontre les limites de la haute technologie quand on se heurte au fanatisme religieux. Si le sujet n'est pas très original, il reste redoutablement efficace compte tenu de l'actualité. La multiplication des angles de prises de vue donne un rythme incroyable, tandis que le suspense est entretenu par la dynamique entre les deux acteurs, Russell Crowe en bureaucrate cynique, et Leonardo DiCaprio, particulièrement convaincant en espion aguerri.

  3. Paris Match
    par Alain Spira

    Efficace mais convenu, son film d'action s'appuie sur l'interprétation physique de DiCaprio et sur le charisme inquiétant de Mark Strong. Quant à Russell Crowe, il compose un personnage qui aurait gagné à moins de cabotinage.

  4. Elle
    par Françoise Delbecq

    Courses-poursuites, explosions à tout bout de champ, c'est un peu James Bond sans vodka-Martini.