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Gregory Peters
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La fin des Showrunners est elle programmée ?

David Chase (et Tony Soprano)

Plus récemment, <strong>Alan Ball</strong>, créateur acclamé de Six Feet Under, laissait son fauteuil de showrunner de True Blood. Officieusement, la fatigue, des coûts de production prohibitifs et le sentiment que l'histoire tirait à la ligne étaient invoqués. Un point que l'on peut difficilement nier, en observant le développement de la saison 6. Son showrunner, <strong>Mark Hudis</strong> n'aura fait qu'une saison. Et la chaîne vient d'annoncer que la septième (conduite par <strong>Brian Buckner</strong>, qui connaît bien la série pour faire partie de la Writers Room depuis la saison 1) sera la dernière. Même résultat du côté de Dexter (sur une autre câblée, Showtime) qui aura changé de showrunner à quatre reprises et risque fortement de s'éteindre dans une indifférence contrainte. HBO, la première, a connu un trou d'air. On raconte qu'en 2007, elle aurait pu avoir Mad Men. Mais le network perd de son acuité et les créatifs rament pour trouver des interlocuteurs réceptifs à leurs pitchs. C'est ainsi que Don Draper a atterri sur AMC. 

Vince Gilligan (et ses acteurs de Breaking Bad)

Chez les artisans historiques de séries de prestige, on fustige le manque de moyens, qui ne seraient pas employés à bon escient.  Chez HBO comme chez AMC, le modèle s?essouffle. Désormais, le laboratoire est ailleurs. C'est Netflix, et bientôt Amazon, qui offrent désormais aux créatifs de prendre en charge la production de leurs projets et font trembler les grands patrons de chaînes dans leurs tours d?ivoire. Netflix, modeste acteur dans la location de vidéo reconverti dans l'entertainment 2.0, s'est désormais imposé comme diffuseur... et producteur incontournable, offrant toute latitude aux créatifs. C'est ainsi qu'est née House of Cards, cornaquée par un cinéaste (<strong>David Fincher</strong>), autour d'un casting « four stars » : <strong>Kevin Spacey</strong>, <strong>Robin Wright</strong>... ou Orange is the new Black, plongée dans une prison pour femmes par la créatrice de Weeds (hier encore sur HBO). Interrogé par le site HitFix, Fincher a répondu que là où la narration d'un film était balisée, le format sériel lui permettait de complexifier le background entre les personnages et les relations entre eux. « J'ai toujours pensé que la meilleure écriture qui soit parvenue aux acteurs ces dix dernières années venait du monde de la télévision ». A l'image, les longs travellings latéraux et cette attention particulière aux détails dans les deux premiers épisodes qu'il a réalisés portent la marque méticuleuse du cinéaste.

Tom Fontana ( et Rodrigo Borgia)

Puis, il y a eu HBO. L'un des premiers à profiter des ambitions de la chaîne câblée est <strong>Tom Fontana</strong>. Suivront <strong>David Chase</strong> et Les Soprano, <strong>David Simon</strong> et The Wire...  Le mantra du network, « It's not TV, it's HBO » aura permis de drainer quelques 28 millions d'abonnés. En novembre dernier, à New-York, la chaîne cryptée soufflait ses quarante bougies. Quarante ans d'un label estampillé « création originale ». En coulisses, la situation n'est pas si idyllique. Il faut se souvenir qu'en pleine diffusion, le patron de HBO voulait même arrêter The Wire au bout de trois saisons, faute d'audience... Finalement, la destinée des communautés de Baltimore se poursuivra jusqu'à la cinquième. 

Matthew Weiner (et son équipe de "Mad Men")

AMC justement. Brutal, le tweet de Sutter jette l'opprobre sur cette jeune chaîne du câble, pourtant réputée pour ses grands séries, comptant quand même Mad Men et Breaking Bad dans son catalogue pour ne citer qu'elles. Mais depuis la mise à l'antenne de ces deux succès, la direction a changé de mains. Les chiffres, énoncés par Spacey dans son speech, révèlent cette fébrilité doublée d'un manque de prise de risques qui empêchent un showrunner de se faire une place au soleil : « l'an dernier, 113 pilotes ont été faits, 35 ont été choisis pour passer à l'antenne, 13 ont été renouvelés. Cette année, 146 ont été tournés et 56 sont devenus des séries ». On connaît la suite et la propension des chaînes à rayer des fictions de leurs grilles de programmes en un éclair.

Showrunners, même les bonnes chose ont une fin ?

A l'heure de la fin de Breaking Bad (après celle de Treme), de celle annoncée de Mad Men, de Coper...  que vont devenir les Showrunners?

House of Cards quand Netflix invite des grands noms du ciné

En chapeautant la direction de l'écriture et la ventilation des moyens alloués par la production, le showrunner a, sur le papier, toutes les cartes en mains. Dans les faits, c'est aussi le premier interlocuteur des financiers quand la série ne marche pas. Le fusible est sensible. Surtout, Gimple doit désormais composer avec la personnalité imposante de Kirkman, très impliqué dans le développement du show, les producteurs et executives de la chaîne. La bête noire des créateurs qui assombrit l'avenir des showrunners et donc des séries, selon bon nombre d'observateurs. Le dernier à avoir pris la parole, en août dernier, n'est autre que <strong><strong>Kevin Spacey</strong></strong>, au casting d'House of Cards, actuellement diffusée sur Canal Plus. Invité au pupitre du Festival International de la Télévision d?Édimbourg, l'acteur a fustigé l'attitude rétrograde des pontes des networks « qui fichent leurs doigts dans des décisions créatives et ont des opinions sur tout ». Une constante dans les années 80.

Boardwalk Empire, la série "de" Martin Scorsese

Des réalisateurs de plus en plus nombreux, désabusés par le recyclage hollywoodien (bonjour les reboots et remakes de 2014), partent exprimer leurs ambitions sur le petit écran. Du pain béni pour les diffuseurs qui apposent un nom immédiatement identifiable du grand public sur leur matériel promotionnel. Dernier en date à avoir été approché, <strong>Ben Affleck</strong>. L'acteur-réalisateur, oscarisé cette année avec Argo, va réaliser un pilote pour la chaîne Fox. Une valeur refuge pour une des quatre grandes chaînes U.S née sur le réseau hertzien et qui peine à renouer avec des séries à succès. Ces transfuges du septième art viennent désormais seconder les showrunners dans leurs tâches quitte à faire de l'ombre aux artisans d'hier. <strong>Martin Scorsese</strong> et <strong>David Fincher</strong> ont eu une implication constante et continue sur Boardwalk Empire et House of Cards), mais sur le papier, le showrunner de Boardwalk est bien Terrence Winter, celui de House of Cards, Beau Willimon. Un terrain propice aux guerres d'égos. En 2011, David Milch, co-créateur de NYPD Blue et showrunner de Deadwood prenait les rênes de Luck, drama ambitieux dans les coulisses des paris hippiques, avec la bénédiction de HBO. Les courses de chevaux, c'est sa danseuse. Seulement, c'est le nom de <strong>Michael Mann</strong> que l'on associe peu de temps après au show, puisqu'il est prévu que le cinéaste produise la série et réalise le pilote. Entre Milch et le réalisateur de Révélations, la tension est palpable. Si Milch avait vraisemblablement son mot à dire sur les scénarii, c'est à peu près tout. En coulisses, Mann est seul aux manettes dans la salle de montage. Finalement, le galop d'essai tourne court : la série est annulée après quelques épisodes seulement, suite à des accidents à répétition sur le tournage qui ont mené plusieurs chevaux à la mort.

Showrunners, la fin ?

Leurs noms claquent comme une signature érigée en étendard de la production sérielle : <strong>David Simon</strong>, <strong>David Chase</strong> ou <strong>Tom Fontana</strong> font partie de ceux qui ont mené de main de maître des séries désormais cultes comme The Wire, Sopranos et Oz.  A l'heure où Breaking Bad et Mad Men, conduites avec autant de savoir-faire par leurs héritiers <strong>Vince Gilligan</strong> et <strong>Matthew Weiner</strong>, s'apprêtent à baisser le rideau, la création originale connaît un nouveau paradigme. Les showrunners ont-ils encore le beau rôle sortis de la salle d'écriture ?  

Sons of Anarchy, la série de Kurt Sutter qui n'a pas sa langue dans sa poche

« AMC est dirigée par des mesquins, des penseurs en fin de parcours qui n'ont aucun respect pour l'effort de leur personnel créatif ». La saillie est signée <strong>Kurt Sutter</strong>, ex-The Shield et showrunner de Sons of Anarchy, la série de bikers vengeurs. Une réaction violente et épidermique en 140 signes postée sur Twitter, suite à l'éviction de son comparse Glen Mazzara de la cabine de pilotage de The Walking Dead en décembre dernier. Situation d'autant plus incompréhensible qu'à l'annonce de la nouvelle (à la veille de Noël), la série vient de boucler une mi-saison exaltante, loin des égarements des deux précédentes. Le feuilleton, adapté du comic book de <strong>Robert Kirkman</strong>, s'apprête à entrer dans sa quatrième saison le 13 octobre prochain et a déjà changé trois fois de showrunner. C'est à Scott M. Gimple que revient le rôle, après avoir été confié à <strong>Frank Darabont</strong> et Mazzara. Résultat, la série devrait revenir aux fondamentaux : « les zombies », assure la productrice du show. 

The Newsroom, le retour d' Aaron Sorkin

Le showrunner acclamé hier est-il maudit aujourd'hui ? Depuis plusieurs années, <strong>Shawn Ryan</strong>, l'homme derrière The Shield, enchaîne les fours (<strong>voir notre diapo</strong>). Pour beaucoup, remettre le couvert après un succès rajoute à la pression. Mais la vieille garde n'a pas dit son dernier mot. Après le succès public et critique d'A la Maison Blanche et l'échec de Studio 60 on the Sunset Strip, <strong>Aaron Sorkin</strong> est passé par la case ciné (où il a signé le scénario de The Social Network de... <strong>David Fincher</strong>) avant de s'imposer à nouveau avec The Newsroom. Laquelle vient juste d'obtenir une troisième saison. <strong>Tom Fontana</strong> a rebondi sur une coproduction internationale (Borgias), <strong>David Milch</strong> s'est vu « greenlighter » le tournage du pilote de Money, projet au doux parfum de corruption au sein des élites américaines. C'est finalement un autre retour, annoncé il y a quelques semaines, qui fait frémir tous les sériephiles : <strong>Chris Carter</strong>, le papa de X-Files, vient de vendre le pilote de son nouveau projet, The After, à Amazon qui se lance à son tour sur l'échiquier de la production sérielle. Un retour en grâce de Carter après avoir fait débuter un certain... <strong>Vince Gilligan</strong>. Jonathan Blanchet

Leurs noms claquent comme une signature érigée en étendard de la production sérielle : David Simon, David Chase ou Tom Fontana font partie de ceux qui ont mené de main de maître des séries désormais cultes comme The Wire, Sopranos et Oz.  A l'heure où Breaking Bad et Mad Men, conduites avec autant de savoir-faire par leurs héritiers Vince Gilligan et Matthew Weiner, s'apprêtent à baisser le rideau, la création originale connaît un nouveau paradigme. Les showrunners ont-ils encore le beau rôle sortis de la salle d'écriture ?