Les Cendres du Temps (redux) de Wong Kar-wai
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La plateforme indépendante programme quatre longs métrages du cinéaste hongkongais dont le tourmenté Chungking Express et le virevoltant Les cendres du temps.

Wong Kar-wai, le cinéaste hongkongais aux lunettes noires pour nuits blanches, celui de Chungking Express, d’Happy Together, d’In the Mood for Love ou 2046, l'homme dont l'élégance feutrée de la mise en scène n'exclut pas les envolées brutales, la fièvre des sentiments, la tragédie intime, le lyrisme infernal... Du sang, des larmes. Des chiffres aussi ! Cette horloge qui marque 00h00 dans Happy Together, ces matricules 633 et 223 dans Chungking Express ou le numéro de la chambre de... 2046... Autant de signes qui indiquent qu'une alchimie secrète est à l'œuvre, qu'un venin coule d'un film à l'autre pour étourdir les esprits. Son dernier long- métrage, le pluvieux et virevoltant The Grandmaster date de 2013. Autant dire une éternité.

La plateforme MUBI propose quatre opus incontournables du maître né à Shanghai en 1958 mais élevé dans une Hong Kong éprise de liberté. Les cendres du temps a été mis en ligne vendredi dernier, puis ce sera au tour de Chunking Express le 2 avril, Les Anges déchus le 16, et enfin Happy Together le 30. Les quatre films traduisent chacun à leur manière la grâce et la vitalité d’un cinéaste visionnaire. Une sélection justement baptisée : "De l’amour. Le cinéma de Wong Kar-Wai".

Et comme un bonheur n'arrive jamais seul, MUBI s'est associé avec Première pour vous permettre de découvrir gratuitement son impressionnant catalogue pendant 30 jours (suivez le lien). 

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Chungking Express (1994)

Deux flics à la dérive après une déception amoureuse noient leur chagrin respectif dans un Hong Kong nocturne où l’éclairage au néon laisse des trainées lumineuses pour celles et ceux qui veulent vivre vite et intensément. Véritable manifeste esthétique empreint de sensualité fiévreuse, ce ballet où le romantisme volontiers désespéré n’empêche pas la violence, Chungking Express a été tourné sans grands moyens façon Nouvelle Vague dans les rues d’Hong Kong. La bande son mélancolique mais toujours solaire apporte un magnifique contrepoint à la noirceur des sentiments. Chungking express forme avec Les anges déchus , un diptyque.


 

Les cendres du temps, version Redux (1994)

Wong Kar-wai s’essaye ici au wu xia pan, le film de sabre chinois, et démontre que sa mise en scène soyeuse adepte d’une certaine langueur, est soluble dans le cinéma d’action pur. Au milieu d’une nature souveraine sublimée par la photo de Christopher Doyle, les (super-)héros de ce film virevoltant, cherchent à se libérer d’un destin qui les poussent inévitablement vers la mort. Le film connut une production chaotique qui failli mettre WKW au ban du cinéma hongkongais. Mubi propose la version « redux » telle que présentée au Festival de Cannes en 2008. 


 

Les anges déchus (1995)

Les anges déchus du film ressemblent comme des frères à ceux de Chungking Express. Là aussi, la fièvre des sentiments impose une fuite en avant permanente. La caméra à l’épaule (toujours le génial Christopher Doyle à la lumière !) permet de saisir sur le vif des personnages tourmentés. Dans cette nuit sans lune où les reflets sur les visages ont les teintes multicolores des néons, une faune interlope en manque de reconnaissance essaie de s’extirper du chaos.


 

Happy Together (1997)

WKW retrouve une nouvelle fois Tony Leung Chiu-wai, présent dans quasiment tous ses films jusque-là. Ce drame amoureux entre Hong Kong et Buenos Aires démontre la capacité du cinéaste à se réapproprier un cadre (ici les faubourgs de la capitale Argentine) pour y imprimer sa propre poésie. Une poésie qui vise à l’universalité et sait se déjouer des frontières, même si le sujet d’Happy Together – les battements irréguliers du cœur d’un couple d’homosexuels hongkongais exilé à Buenos Aires – joue à plein la carte du déracinement. Le cinéaste reçoit un Prix de la mise en scène à Cannes qui le propulse un peu plus comme une star du cinéma d’auteur international. Un statut qui se renforcera avec son projet suivant, In the Mood for Love.