La tournage du film d'Abel Ferrara sur la chute de Dominique Strauss Kahn vient de se terminer, juste à temps pour en dévoiler quelques images à la presse du monde entier opportunément rassemblée à Cannes à partir de demain, et tout juste deux ans après l'arrestation de l'ancien patron du FMI. C'est Vincent Maraval, le patron de Wild Bunch (à l'origine du débat qui agite le cinéma français depuis des mois), qui annonce ce qui promet de devenir un des événements du Festival de Cannes dans un entretien au magazine Screen Daily.Il en profite pour en dire plus sur ce film dont on sait finalement peu de choses au regard de son potentiel médiatique. Apparemment titrée Welcome to New York, l'histoire portée par Gérard Depardieu et Jacqueline Bisset se concentre moins sur le scandale politique que sur les conséquences d'une humiliation publique sur un homme et son couple. « Ce ne sont absolument pas Strauss Kahn ou la politique française qui ont intéressé Ferrara, mais plutôt ce que signifie être publiquement déshonoré à cause d'une addiction, en l'occurrence sexuelle, et quelles sont les conséquences sur le couple qui jusque là vivait dans le déni. » « Ferrara a isolé la dimension shakespearienne du fait-divers » poursuit Maraval, qui souligne le parallèle entre l'histoire de DSK et celle du réalisateur de Bad Lieutenant, tombé en disgrâce dans les années 1990 quand sa toxicomanie a été révélée au grand jour.Cette histoire shakespearienne (que Ferrara a co-écrit avec l'aide d'un psychanalyste spécialiste des sex-addicts) est découpée en deux parties. La première, autour de l'arrestation de DSK, est basée sur les rapports de police, articles de presse et images publiques. La deuxième, qui s'intéresse aux quatre mois passés par le couple Strauss Kahn-Sinclair dans le luxueux appartement new-yorkais de Tribeca, est en revanche purement fictionnelle. Les personnages ne portent pas les noms de leurs doubles réels et, selon Screen Daily, le DSK fictionnel (renommé Déveraux) est "un homme habité par un appétit sexuel débridé et frénétique. Un homme qui voulait sauver le monde, mais n'a pas pu se sauver lui-même".Mais il ne suffit évidemment pas de modifier les noms pour être à l'abri des ennuis quand on s'empare d'un sujet si sensible. « Une douzaine d'avocats travaillent sur le projet explique Maraval. Chaque scène tournée est validée par un avocat, même les scènes improvisées ». Un projet qui a mis du temps à se monter, faute de financement. A l'arrivée d'ailleurs, le film de Ferrara, distribué par Wild Bunch, se sera fait sans un centime français. « Je ne crois pas qu'il y ait eu de coup de fil de l'Elysée ou de quiconque interdisant de soutenir le film. Les gens se sont auto-censurés » déplore Maraval, qui en profite pour fustiger, une fois encore, le système de financement du cinéma français.Les premières images de Welcome to New York devraient être dévoilées en fin de Festival.Photos : Depardieu est DSK, Bisset est Sinclair