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Il divo, L’Ami de la famille, La Grande Bellezza... : tous les héros des films de Paolo Sorrentino sont des vieux, des dandy lessivés par le temps qui passe, des monstres de foires à la laideur fanée ou des notables politiques croulants… Youth dans lequel deux octogénaires regardent le temps passer pousse un peu plus loin ces obsessions. Les regrets, la nostalgie douloureuse, les soupirs, la mort qu’on regarde dans les yeux et l’espoir qui s’éloigne quand on tente de le resaisir sont l'axe central de son cinéma clinquant et terriblement émouvant. Sorrentino semble tout connaitre du vieillissement, de la déréliction et en revoyant ses films, on pense souvent aux mots de Jep (7'00 dans la vidéo) qui ouvraient La Grande Bellezza ("ce que je préfère, c’est l’odeur des maisons de vieux"), comme si cette confession de l’écrivain était en fait celle du cinéaste.  Sorrentino : "Je crois que je pourrai reprendre à mon compte la phrase de Jep. C’est vrai, j’aime aussi cette odeur, l’odeur des maisons des vieux. D’un point de vue biographique, enfant, j’ai grandi avec des vieux. Je n’étais pas vraiment fils unique, mais mes frères étaient plus grands et mes parents âgés. Ma curiosité, mon intérêt, m’ont tout de suite porté vers les gens plus vieux que moi et ce, dès mon enfance. J’ai toujours regardé les jeunes avec distance, un peu comme les vieillards qui rentrent dans un bus et voient un ado assis et se disent : 'il occupe la place où je devrais m’asseoir'. Je ne les méprisais pas vraiment, mais je les regardais plutôt avec un certain détachement. Du coup, quand j’ai pu faire du cinéma, c’est vers eux que je me suis tourné.Beaucoup de choses me fascinent chez eux. Mais d’abord, ils m’intéressent parce qu’ils incarnent un lien avec ce que tu ne peux plus avoir. Ici, dans Youth, c’est le futur. Il leur est compté, mais je voulais savoir comment ils l’envisageaient. C'est l'idée centrale du film.Gaël Golhen